Un exemple le B.R.F. (Bois Raméal fragmenté).
La réduction de la pression sur la ressource en eau (tant quantitative que qualitative) et la lutte contre la dégradation des sols, représentent deux défis majeurs que l’agriculture doit relever aujourd’hui, ce qui implique de nombreuses remises en question dans différents domaines.
Ces dernières années le sol a été le plus souvent considéré comme un substrat de culture avec pour conséquence un appauvrissement considérable de sa capacité à résister aux aléas climatiques (sécheresse, inondation) ainsi qu’aux attaques des bio-agresseurs. La différence entre cet écosystème devenu artificiel et l’écosystème forestier qui ne demande ni eau, ni engrais, ni pesticide est frappante. L’étude du fonctionnement des forêts a débouché sur l’utilisation en agriculture de broyat de branches d’arbres ou arbustes, plus connu sous le nom de B.R.F. (Bois Raméal fragmenté).
De nombreux bénéfices attendus Les B.R.F. semblent en effet posséder de nombreux atouts : ils stimulent l’activité des organismes du sol, augmentent la teneur en humus stable et par-là même, la capacité à retenir l’eau (jusqu’à 20 fois son poids) et les éléments minéraux. En outre, ils améliorent la structure du sol et limitent l’érosion. Ils accroissent aussi la réserve en eau du sol par sa restructuration et régulent son humidité grâce à l’augmentation de l’activité biologique. Les plantes résistent ainsi mieux à la sécheresse.
Les aquaporines complètent l’effet humus. Découvertes en 1988 par le prix Nobel de chimie 2003, les aquaporines sont des protéines « canal à eau » présentes dans tous les organismes vivants. L’enrichissement du sol par une couverture de fragments de bois induit la dégradation de la lignine par des champignons, favorise la présence des aquaporines, qui favorisent elles-mêmes la conservation de l’humidité.
Un principe simple mais efficace Des rameaux verts d’essence feuillus sont fragmentés, broyés puis répandus au sol ou incorporés aux premiers centimètres du sol. La technique des BRF est en fait comparable à une accélération du processus pédogénétique naturellement en œuvre dans la forêt. Le BRF agis alors positivement sur l’ensemble des composantes du sol : minérales, énergétiques, biochimiques, chimiques et biologiques pour en faire une synthèse dont l’expression sera composite et dynamique. Ils permettent une aggradation (par opposition à dégradation) du système sol avec pour effet une augmentation de la biodiversité, un apport direct d’énergie au sol et la formation d’humus forestier. Ce sont les fractions lignine du bois :
la guaïcyl et la syringyl, les deux polyphénols les plus importants avec les tannins, qui jouent un rôle primordial dans la pédogenèse.
Les BRF sont constitués de trois parties, les branches, les rameaux et les feuilles. Les rameaux doivent être de diamètre inférieur à 7 cm, fragmentés jusqu’à 5-10 cm de longueur. Les BRF jouent un rôle très précis dans la formation et le maintien d’un sol fertile ce qui n’est pas le cas des écorces, du bois de tronc, des sciures, des copeaux de rabotage ou de tout autre résidu d’origine industrielle.
Un matériau et deux techniques Selon les cultures et l’objectif recherché, les BRF seront soit étalés en une couche de 1 à 3 cm au sol pour constituer un paillage naturel, soit incorporés dans les 5 à 10 premiers centimètres du sol. Dans les deux cas, il faut 66 t/ha (250 m 3 /ha) de BRF la première année. Par la suite, un apport de 20 t/ha doit être réalisé tous les 3 ans.
II Le dispositif expérimental mis en place depuis quelques années ce matériau suscite un intérêt croissant. Mais il y a de nombreuses incertitudes sur les conditions d’utilisation des B.R.F. Les références bibliographiques font état le plus souvent d’un apport en automne de 250 m 3 /ha. Le sol peut-il « digérer » une telle quantité ? Quelles seront les conséquences d’un tel apport sur le cycle de l’azote et de la disponibilité du nitrate pour les plantes cultivées ?
L’incorporation d’une aussi importante quantité de matière organique peut-elle augmenter la pression des bio-agresseurs (taupins, limaces, escargots…) ?
Faut-il utiliser des B.R.F. frais ou compostés ? Quelles essences choisir ? Les
résineux sont-ils à exclure ?
Notre travail entrepris n’a pas pour vocation de répondre à toutes les questions posées par la mise en œuvre de cette nouvelle technique. Il se propose dans un premier temps de vérifier l’intérêt des B.R.F, et dans un second temps de préciser son mode d’emploi. Devant la multitude des combinaisons possibles, nous avons émis plusieurs hypothèses de travail
prenant en compte les pratiques actuelles des agriculteurs.
Les hypothèses de travail choisies afin de faciliter l’adoption éventuelle de cette technique par les producteurs et la mise en évidence d’effets mesurables, nous avons fait le choix d’une part, de réaliser ce travail d’acquisition et d’insérer l’utilisation des B.R.F. dans l’itinéraire cultural des agriculteurs.
L’apport de B.R.F. constitue l’unique modification des pratiques.
Ainsi, les conséquences du B.R.F. sur la gestion hydrique des cultures seront observées sans que la pratique des agriculteurs ne soit modifiée. Un ajustement des irrigations en fonction des modalités (notamment témoin et B.R.F.) rendrait difficile la mise en évidence d’un effet B.R.F., celui-ci étant couplé à un effet dose d’apport en eau.